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Laissée à la surveillance étouffante et tyrannique d'un grand frère de vingt ans à la vie totalement débridée, elle est rentrée dans les Compagnons par désœuvrement.
Sans être ce qu’on appelle méchamment une « Marie-Chantal », elle était d’une consternante ingénuité.
Au bout de neuf jours d'échecs répétés au début de la formation initiale, elle craqua, totalement, et peut-être dangereusement.
Elle partageait la chambre avec Nathalie. Celle-ci passa la nuit entière à lui remonter et les bretelles et le moral.

Née il y a quatorze ans d’un père, chef d’entreprise, et d’une mère, directrice de ventes d’un important groupe industriel, elle n’eut pas de parents présents, sans avoir, comme Nathalie, des parents absents.
Le traitement infligé par son grand frère a laissé en elle des séquelles importantes. Il lui imposa ce surnom à la place de son prénom.
Au début de sa formation, on a pu penser que cette fille était béate. Elle a su démontrer le contraire.
Béa est loin d’être moche, mais elle ne sait pas s’embellir.
C’était le genre à traverser une bande de garçons sans qu’ils s’en aperçoivent.
Béa n’avait plus que sa camarade de chambre. Sans elle, on aurait pu craindre qu’elle ne se décidât à mettre définitivement fin à ses difficultés. Nathalie encourut la pénalité de cinquante points pour une nuit blanche au cours de laquelle elle s'attacha à relancer sa copine.
À l’arraché, comme on se cramponne à une bouée sur une mer déchaînée, elle obtint sa formation initiale et le nombre de points nécessaires pour la filière des Enquêteurs, non pas qu’elle le voulût, mais pour ne pas quitter le seul être qui la comprenait.
Elle alla de gifles morales en désillusions dans le premier mois de sa formation Enquêteurs. L’embrouille avec Jules, suivie de son pardon reçu le lendemain même, les petites piques de ce garçon qu’elle admirait secrètement, la présence indéfectible de sa copine qui devenait de jour en jour une véritable amie a rendu possible sa certification.

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